Je m’appelle Christelle, j’ai 17 ans. Voilà plus d’un an maintenant que je souffre d’hyperphagie coupée de quelques phases d’anorexie…
Je suis nulle, grosse, répugnante…
J’ai trop de rêves, toujours la tête dans les nuages à m’imaginer la perfection. Pour moi, c’est le but, je vis pour cela : être parfaite et parfaitement seule, indépendante.
Mon seul objectif : maigrir le plus possible pour l’indépendance entière, sans personne, plus de formes, plus de graisse, juste une touche de légèreté suffisant à prouver que j’existe, juste pour la perfection.
Mais ce n’est qu’un rêve pour le moment, là je suis sale, j’ai 20 kg de trop, j’éprouve ce dégout, cette honte de moi-même et surtout de mon corps impur.
Des ambitions, j’en ai, mais elles se trouvent si profondément en moi que je ne parvient pas à les réaliser, à leur faire prendre forme.
Je veux être seule ! J’en ai assez de ma famille, du lycée, de la société, de la technologie. Vivre en harmonie avec la nature, sans pesanteur, n’être qu’un léger souffle de vie parfaitement parfaite.
Je hais l’humanité, mais la pire souillure c’est moi.
Je ne veux pas laisser tomber, je veux maigrir et j’y parviendrais… Et si je n’ai pas le bac ? Si mon orientation ne se déroule pas comme prévu…
Jamais rien ne se passe comme prévu, j’ai eu des choix à faire, j’ai toujours fait les mauvais, je ne suis qu’une ratée et je ne veux pas avoir une vie “normale”. Je veux souffrir pour devenir pure, c’est dans la souffrance que je découvrirais le bonheur. De toute manière, sur quoi se base-t-on pour établir la normalité ?
Elle n’existe pas, ce n’est qu’une illusion parmi d’autres, rien de ce qu’on ressent n’est réel, ce ne sont que des images… Le néant est en dessous.
J’ai peur, j’angoisse toujours, mes notes ne sont pas bonnes, je suis nulle, je n’aurais jamais le bac. Je ne sais rien faire, même pas me cacher et me taire.
Alors je mange, ou plutôt je “bouffe”, pour compenser ce vide à l’intérieur non pas de mon corps mais de mon esprit, de mon “âme”…
Je n’en peux plus, tout est flou autour de moi et j’avance à tâtons pour ne pas tomber encore plus bas.
Némésis